C’est en 2018 que mon frère, qui commençait à se questionner sur sa propre neurodivergence, m’a mise sur la piste du syndrome d’Asperger. J’avais 44 ans et je ne me doutais de rien. Même si je me savais un peu différente des autres, je m’assumais pleinement et n’avais aucune honte à parler ouvertement de mes travers et bizarreries. Ainsi, c’est la curiosité et non un profond mal être qui m’a poussée à me renseigner sur le sujet et, quelques mois plus tard, à obtenir un diagnostic.
Cet été-là était assez catastrophique sur le plan professionnel (je suis travailleuse autonome et les mandats se faisaient rares à l’époque). Résultat : j’avais beaucoup de temps libre. J’ai donc décidé de lire tous les ouvrages en lien avec la chose sur lesquels je pouvais mettre la main à la Grande Bibliothèque, ceux écrits par des spécialistes autant que par des autistes. Certains récits personnels m’ont rendue perplexe (hein, je ne suis pas comme ça?!?!) alors que d’autres m’ont fait rire ou m’ont émue, signe que je me reconnaissais en eux.
Ces réactions contradictoires provoquées par mes lectures s’expliquent par le fait qu’il s’agit d’une condition étrange : chaque personne qui en est atteinte a sa propre combinaison de symptômes, et ces derniers peuvent en outre varier en intensité. Pour faire une analogie alimentaire, je comparerais l’autisme à un bar à salade dont les divers ingrédients représenteraient des symptômes. Le hasard (et peut-être la génétique aussi) détermine la salade qui nous est attribuée à la naissance. La mienne comporte certains éléments très communs, disons des tomates et des concombres, mais également des avocats, de la roquette et du thon. Un autre individu aura dans la sienne — en plus des concombres et tomates — des épinards, des radis, du brocoli, de la luzerne et des œufs. Ajoutons à cela la vinaigrette, qui correspond à la personnalité de chacun. Il en résulte donc une très grande diversité culinaire malgré l’apparente simplicité du plat.
Pour éclairer ceux et celles qui s’interrogent sur le fonctionnement de leur cerveau particulier — et, pourquoi pas, pour aider les neurotypiques qui nous côtoient à comprendre nos réactions parfois étonnantes —, j’ai pensé ajouter mon grain de sel à la littérature sur l’autisme en vous parlant de mon bol de salade à moi. Je le ferai en réexaminant des événements cocasses ou embarrassants de ma vie sous la lentille du syndrome d’Asperger, une démarche qui m’amènera sûrement, dans certains cas, à réfléchir aussi à toute la question des normes sociales.
Voilà ce que j’aspire à faire avec cette infolettre, dont le titre se veut un clin d’œil aux Chroniques martiennes de Ray Bradbury (parce que oui, les personnes autistes sont souvent vues comme des extra-terrestres!). En espérant que vous y prendrez goût!
Bravo et merci pour tes écrits qui se veulent une belle sensibilisation au syndrome d'asperger 💜
J’ai déjà hâte de lire la suite. Bravo Isa pour cette initiative. Et j’adore ton style d’écriture!